Partage d’expérience viticulture et agroforesterie

Réduction de l’usage chimique dans la viticulture
Viticulture et agroforesterie : à l’occasion du SIVAL 2024, une conférence a exploré les démarches entreprises pour réduire l’usage des produits chimiques dans la viticulture, tout en intégrant des pratiques biologiques et respectueuses de l’environnement. Viticultrice et consultante, Marie-Pierre Lacoste-Duchesne a partagé son expérience de la mise en pratique des principes de l’agroécologie et plus particulièrement de l’agroforesterie sur sa propriété (Château La Clotte-Cazalis, certifiée AB). Cette exploitation située en Gironde sert d’exemple concret, mettant en avant l’importance du passage à des pratiques biologiques certifiées. Après un début d’activité avec des itinéraires techniques conventionnels, une réflexion sur le développement du botrytis a conduit à revoir les pratiques viticoles. La transition vers l’agriculture biologique, amorcée en 2012, s’est concrétisée avec une certification complète en 2015 pour réduire l’impact chimique et favoriser l’équilibre des écosystèmes.
La conférence insistait sur la nécessité d’adapter les modèles agricoles au contexte actuel marqué par l’impact du climat. Les viticulteurs doivent produire mieux, avec une régularité accrue, tout en respectant les exigences environnementales. Cette intervention a également démontré que réduire les intrants chimiques améliore la résilience des sols et le développement optimal des champignons nécessaires à la production des pourritures nobles. La transformation des pratiques agronomiques s’inscrit dans une vision à long terme de la performance économique durable des exploitations.
Agroforesterie et diversification des cultures
Les avantages de l’agroforesterie pour les productions agricoles ont également été abordés, notamment son impact sur la stabilisation des sols, la gestion des nutriments résiduels et l’érosion. Une expérience d’agroforesterie mise en œuvre depuis 2012 dans une exploitation a permis d’illustrer ces bénéfices. La plantation de plus de 600 arbres, avec des espèces telles que le charme, l’orme et le frêne, a été planifiée selon la largeur des engins agricoles pour maintenir une compatibilité pratique. Le choix des essences et leur disposition pour minimiser la perte de surface cultivée s’avèrent essentiels. Sur dix hectares de culture de maïs, les résultats ont révélé une meilleure résilience des sols et une absence de perte de vigueur près des arbres, même lors d’étés secs et chauds comme celui de 2022.
Pour les vignobles, l’agroforesterie a été introduite en 2017 avec une conception intégrant des haies fruitières et des îlots de biodiversité. La distance entre les arbres et les vignes a été ajustée pour équilibrer les besoins en ensoleillement et protéger les cultures des températures extrêmes. Ce modèle favorise également la circulation de la faune, notamment les pollinisateurs et les oiseaux, qui s’appuient sur cette continuité écologique. Des expériences sur des îlots de vignes et des haies fruitières composées d’arbres comme les abricotiers ou les poiriers ont illustré l’importance des choix variétaux et porte-greffes pour optimiser les productions et respecter les contraintes agronomiques.
Gestion intégrée et multifonctionnalité de l’arbre
La gestion intégrée de l’usage des arbres dans des systèmes agricoles est un aspect clé de la démarche abordée au SIVAL. L’arbre ne se limite pas à une plantation fixe ; sa gestion, sa taille et ses fonctions doivent être anticipées. L’expérimentation d’une haie fruitière diversifiée a permis d’enrichir les sols, d’apporter une protection climatique et d’héberger une grande diversité de faune. Les conduites spécifiques pour les fruitiers, comme le palissage ou les tailles en trogne, démontrent que des solutions adaptées existent pour toutes les configurations agricoles.
Au-delà de la production directe, les arbres servent dans des rôles annexes comme la production de bois d’œuvre, la fixation d’azote ou le renforcement des écosystèmes. Leur organisation dans le paysage agricole peut inclure des zones régénérées naturellement ou des plantations stratégiques pour interconnecter les habitats existants. Par exemple, en bordure de digues ou de zones humides, les arbres comme le saule osier renforcent la biodiversité et peuvent être valorisés pour des usages artisanaux. Des initiatives participatives pour planter des arbres ont également été mentionnées comme des opportunités pour sensibiliser et mobiliser les acteurs locaux autour des projets agroforestiers. Enfin, des pratiques complémentaires, telles que la traction animale ou l’éco-pâturage, viennent compléter une gestion globale des exploitations, en intégrant des rotations rapides pour minimiser l’impact sur les sols. Ces approches témoignent de l’importance d’un équilibre global entre les cultures, les sols et les végétaux présents, dans une perspective d’agroécologie et de transition agricole.