DEPHY, 10 ans de résultats ! Impacts globaux pour une exploitation viticole (cas concret)

10 ans d’analyse sur les impacts des pratiques viticoles dans le cadre du réseau DEPHY
À l’occasion du SIVAL 2024, plusieurs thématiques ont été abordées pour analyser les résultats d’une décennie du réseau DEPHY, dédié aux pratiques agricoles et viticoles. L’étude se concentre sur un échantillon de 415 exploitations, réparties sur les différents vignobles français. De 2011 à 2021, les données collectées ont porté sur divers aspects technico-économiques, environnementaux et sociaux. Parmi les points majeurs, une réduction globale de l’indice de fréquence des traitements (IFT) de 14 % a été observée, avec une hausse notable de 45 % de l’utilisation de solutions basées sur le biocontrôle. Cette dynamique reflète les efforts en faveur d’une transition écologique et économique durable dans le secteur viticole.
L’utilisation des alternatives aux phytosanitaires a été un levier clé. Les solutions impliquant la confusion sexuelle et les pratiques telles que le désherbage mécanique ou l’enherbement ont permis de sortir partiellement des usages traditionnels d’herbicides. Certaines pratiques innovantes, comme l’éco-pâturage ou le vitipastoralisme, commencent à émerger dans les vignobles. Ces initiatives ont permis de diminuer de 24 % les fongicides hors biocontrôle en dix ans. Par ailleurs, elles ont conduit à une réduction majeure des herbicides utilisée, avec 35 % des exploitations n’en ayant plus recours. Les exploitations biologiques ou en cours de conversion affichent systématiquement des IFT inférieurs par rapport aux exploitations conventionnelles, témoignant des bénéfices de telles transitions agricoles.
Études locales et spécificités technologiques : focus sur la cave coopérative Robert et Marcel
Un exemple notable présenté lors du SIVAL concerne un groupe de viticulteurs de la cave coopérative Robert et Marcel, située en Anjou. Depuis 2014, ce groupe utilise une série de leviers pour réduire l’impact des traitements phytosanitaires et améliorer leurs performances agricoles. Parmi les mesures mises en place, on retrouve l’optidose, une meilleure qualité de pulvérisation ainsi que la plantation de cépages résistants. La gestion des sols et l’élargissement des zones d’enherbement figurent parmi les améliorations notables ayant contribué à la baisse globale des IFT pour les herbicides et les fongicides, respectivement de 50 % et 30-40 %.
Entre 2014 et 2022, les viticulteurs du groupe ont affiché des ratios croissants entre les IFT biocontrôle et hors biocontrôle, illustrant une adoption complète des solutions biologiques au détriment des techniques conventionnelles. L’étude révèle que les produits chimiques comme les insecticides ou les herbicides sont désormais marginalisés au profit de substances reconnues pour leur efficacité environnementale et économique, notamment le cuivre ou le soufre.
S’agissant des impacts économiques, les charges globales n’ont pas significativement varié par rapport à l’état initial. Cette stabilité est en partie attribuée à l’économie générée par la moindre consommation de phytosanitaires. Bien qu’une augmentation du temps de travail et de l’utilisation du matériel ait été observée, celle-ci est compensée par la réduction de certains coûts ainsi que par des stratégies locales d’optimisation des ressources.
Enjeux sociétaux et perspectives du réseau DEPHY
Au-delà des résultats techniques, une analyse approfondie a été réalisée sur les dimensions socio-économiques et environnementales. Les impacts positifs s’étendent à la diminution des émissions de gaz à effet de serre, grâce à une réduction de l’utilisation des intrants ainsi qu’à une meilleure optimisation des pratiques. Les analyses sur le cycle de vie, utilisant entre autres Diag Décarbon’Action et Viti Simuleco, mettent en évidence les bénéfices économiques et écologiques de la transition. Ces outils, associés à des entretiens individuels avec les exploitants, ont révélé que les changements de pratiques s’ancrent dans une adaptation locale et des dynamiques spécifiques à chaque exploitation.
Toutefois, plusieurs challenges subsistent. L’augmentation de la consommation en carburant, liée à l’intensification du travail mécanique, et les disparités entre les modes actuels de valorisation restent des freins significatifs. Le développement de techniques plus adaptées à chaque contexte géographique et climatique pourrait apporter des solutions. La qualité de la pulvérisation a également été identifiée comme un facteur-clé pour maximiser l’efficacité des traitements et réduire leur impact environnemental. À ce sujet, les conseillers du réseau DEPHY jouent un rôle actif dans l’accompagnement des exploitants, favorisant une montée en compétence individuelle et collective.
Le réseau DEPHY amorce un tournant stratégique vers des transformations plus profondes. Parmi les pistes évoquées figurent la conversion accrue vers l’agriculture biologique, la diminution progressive de l’utilisation de matières actives spécifiques et l’intégration de solutions pour mieux répondre aux enjeux climatiques. L’approche collective et les synergies engendrées par ce réseau continuent de poser les bases d’une viticulture durable et innovante.